Conseils de l'expert
Les isolants biosourcés continuent de s’implanter dans le marché des matériaux de construction et de rénovation. L’occasion de se pencher à nouveau sur leurs caractéristiques, leurs conditions de mise en œuvre, ainsi que leurs avantages spécifiques.
Selon le temps dont vous disposez et votre curiosité, l’article peut être lu dans sa totalité, sinon un résumé est disponible à la fin de celui-ci.
Caractéristiques
Les produits d’isolation se classent en 3 principales familles selon le matériau utilisé pour leur fabrication. On distingue :
. les isolants synthétiques provenant de l’industrie du pétrole comme le polystyrène (expansé ou extrudé) et le polyuréthane.
. les isolants minéraux qui constituent la famille des isolants parmi les plus utilisés encore à ce jour. Ils comprennent les laines de verre et laines de roche, le béton cellulaire ainsi que les différents isolants à base de verre (verre cellulaire, mousse de verre, verre expansé) ou de roche (perlite expansée, vermiculite, pierre ponce, pouzzolane, argile expansée).
. La 3ème famille qui nous intéresse ici est celle des isolants végétaux. Celle-ci regroupe les différents isolants à base de bois (laine de bois, fibre de bois, fibragglos, liège, bois déminéralisé, bois rétifié) et les isolants à base de végétaux à croissance rapide (ouate de cellulose, laine de coton, chanvre, lin, pailles de céréales, herbe).
Quelle que soit sa famille, un isolant bénéficie de caractéristiques pour assurer une fonction bien définie : éviter les transferts de chaleurs entre 2 environnements ou 2 volumes. En hiver, par exemple, nous cherchons à éviter que les calories du logement (volume chauffé) ne s’équilibrent avec l’extérieur ou avec un volume non chauffé (comme un garage ou un sous-sol). Pour cela, les parois qui délimitent le volume chauffé du logement doivent contenir des matériaux qui s’opposent à ce transfert ou flux de chaleur.
Cette caractéristique d’une paroi à s’opposer au flux de chaleur naissant de la différence de température entre les 2 volumes qu’elle délimite est notée U, nommée coefficient de transmission surfacique, et se mesure en W/m²K. Autrement dit, elle caractérise le flux de chaleur mesuré en Watt passant dans un m² de paroi soumis à une différence de température de 1 Kelvin entre ses 2 faces. Plus une paroi est isolante, moins le flux qui la traverse est important, donc plus sa valeur U est faible.
La propriété isolante d’une paroi dépend de l’épaisseur d’isolant qu’elle contient, et ce, selon la relation suivante : U = λ/e. C’est précisément cette relation qui permet de mettre en évidence la performance intrinsèque de l’isolant puisqu’elle fait abstraction de l’épaisseur du produit : le lambda (λ) est appelé la conductivité thermique, et permet donc de comparer les différents isolants abstraction faite de leur épaisseur.
Les caractéristiques des principaux isolants sont indiquées dans le tableau suivant :
Produits d’isolation | Lambda sec à 10°C en W/m.K (λ) |
Fibre de bois | λ = 0.036 à 0.047 |
Isolant sous vide | λ = 0.005 à 0.007 |
Laine de chanvre | λ = 0.039 à 0.044 |
Laine de lin | λ = 0.037 à 0.042 |
Laine de mouton | λ = 0.039 à 0.042 |
Laine de roche | λ = 0.034 à 0.047 |
Laine de verre | λ = 0.030 à 0.046 |
Ouate de cellulose | λ = 0.038 à 0.044 |
Polystyrène (PSE) | λ = 0.030 à 0.038 |
Polystyrène (XPS) | λ = 0.029 à 0.036 |
Polyuréthane | λ = 0.021 à 0.028 |
Produits minces réfléchissants | Dépend du nombre de couches et de leur nature |
Textiles recyclés | λ = 0.037 à 0.039 |
Verre cellulaire | λ = 0.036 à 0.050 |
© Isover – site Tout sur l’isolation
Si on veut comparer les isolants en tenant compte de l’épaisseur mise en œuvre, la valeur à considérer est alors R, la résistance thermique, qui n’est autre que l’inverse de U.
Ainsi, pour une isolation de mur, on pourra choisir un isolant avec une résistance thermique de 4.40 m²K/W. Par exemple :
. 160 mm de laine de bois de λ 0.036
. ou 175 mm de ouate de cellulose de λ 0.040
. ou encore 140 mm de laine de verre de λ 0.032
Sur ce point précis de la performance, on constate que les isolants biosourcés sont comparables à l’isolant le plus implanté, la laine de verre. Nous verrons ci-dessous que leurs avantages sont ailleurs.
Conditions de mise en œuvre
Les grandeurs U, R, λ permettent de comparer et de choisir un isolant en fonction de son application. Cependant, les qualités du matériau isolant ne suffisent pas à garantir l’efficacité de l’isolation réalisée, et les isolants biosourcés ne dérogent pas à la règle suivante : un bon isolant est un isolant bien mis en œuvre.
La première condition pour que l’enveloppe isolante soit efficace est qu’elle doit être continue. L’absence d’isolant ou une épaisseur moindre à un endroit réduit bien évidemment les performances globales de la paroi, et crée également un risque de condensation au niveau de ce point froid. Ce problème nommé pont thermique recouvre des cas de figures très différents.
Il peut s’agir d’un isolant qui n’épouse pas correctement le volume dans lequel il s’insère. Par exemple, un rouleau d’isolant qui ne vient pas bien au contact des poutres entre lesquelles il est mis en œuvre. L’espace vide donne lieu à un échange de calories entre les 2 côtes du plancher ou plafond avec l’air pour vecteur de transmission.
L’absence d’isolant est parfois plus difficile à éviter parce qu’elle tient à des contraintes structurelles. Il s’agit par exemple, dans le cas d’une isolation des murs par l’extérieur, d’un défaut de continuité d’isolant entre le haut des murs et l’isolation de la toiture. La finition en sous-face d’un avant-toit est en effet à déposer si l’on veut éviter un pont thermique à cet endroit en faisant monter l’isolant au plus haut. Au niveau des encadrements de fenêtres également, l’isolation extérieure permet uniquement la mise en œuvre d’un isolant d’épaisseur réduite, limitée par les profils de fenêtres ou la largeur des coulisses de volets.
De même, dans le cas d’une isolation des murs par l’intérieur, certains endroits peuvent ne pas être isolés. Cela réduit la performance globale des travaux. C’est le cas des abouts de murs de refends et des abouts de dalle béton au contact des murs extérieurs.
Par ailleurs, un isolant trop comprimé est affaibli ponctuellement à cet endroit. On trouve ce cas de figure lorsqu’un plancher de grenier comporte un isolant apparent sur lequel on vient stocker des matériaux (tuiles de rechange) ou des cartons en écrasant celui-ci. De même, des passages répétés sur un tel isolant finissent par le tasser. Un cheminement réalisé par des panneaux sur des supports rigides est à prévoir en cas de besoin d’un accès récurrent à un grenier.
La deuxième condition pour qu’un isolant soit efficace est qu’il ne doit pas être soumis à une humidité trop importante. L’humidité dans l’air du logement (provenant de la cuisson, de la salle de bains ou de la respiration) tend à l’équilibre avec l’humidité de l’air extérieur qui est moindre (notamment en période froide). Cette humidité sous forme de vapeur d’eau pénètre dans l’isolant où elle passe progressivement d’une température correspondant à celle d’un intérieur chauffé, à celle de l’air extérieur. Et en refroidissant, cette humidité peut condenser et stagner dans l’isolant.
Or, l’eau pose 2 problèmes dans un isolant :
. Le premier, commun à tous les isolants, est qu’elle agit comme des micro ponts thermiques et donc qu’elle dégrade l’efficacité de ceux-ci. L’eau est en effet un conducteur de chaleur, propice ici aux fuites de calories (au même titre qu’un vêtement humide qui crée une sensation de froid en hiver).
. Le second est que la condensation peut dégrader l’isolant lui-même lorsqu’il est sensible à l’eau. C’est le cas des isolants biosourcés. Une humidité prolongée dans une laine de roche réduira ses performances mais n’abimera pas celle-ci, ce qui n’est pas le cas pour une laine de bois, de coton, ou de la ouate de cellulose.
Deux moyens permettent de lutter contre ce risque :
. Le premier est la ventilation du logement. L’installation d’une ventilation mécanique contrôlée (VMC) ou le remplacement de celle-ci au bout d’une durée de 20 ans est un poste de travaux indissociable des travaux d’isolation. Ce système, en plus d’évacuer les polluants d’origine intérieure et le CO2 émis par les occupants, permet de réduire le taux d’humidité dans le logement, et donc de lutter contre les risques de condensation à l’intérieur de l’isolation.
. Le second qui s’est imposé, notamment en rénovation, pour éviter la condensation dans un isolant mis en œuvre côté intérieur, est la mise en œuvre d’une membrane pare-vapeur (ou frein-vapeur selon son degré de perméance à la vapeur d’eau). Cette membrane, mise en œuvre en amont de l’isolant, vise à retenir l’humidité de l’air avant qu’elle ne pénètre dans l’isolant. Pour être efficace, elle doit être la moins traversée possible (par les gaines électriques jusqu’aux boitiers d’interrupteurs ou de prises, par les vis de fixation des panneaux de finitions). Il existe pour cela des systèmes de fixation spécifique qui permettent de garantir une bonne étanchéité à l’air et à la vapeur d’eau au niveau des traversées. De plus, pour être efficace, cette membrane devra être correctement jointoyée contre la maçonnerie (sol, plafond) et les menuiseries, afin de limiter au maximum les entrées d’air parasites.
Remarque : le pare-vapeur intégré à certains rouleaux de laine de verre sous forme de papier kraft n’est pas suffisant : à cause de sa perméance, et surtout parce qu’il ne constitue pas une surface continue. Son effet s’avère même contre-productif. En effet, la discontinuité de celui-ci tend à concentrer à l’humidité au niveau des jonctions de rouleaux et accroitre les phénomènes de condensations.
Avantages spécifiques
Qu’en est-il des propriétés spécifiques des isolants biosourcés puisqu’on a vu que leur performance (mesurée par le lambda) est comparable aux isolants conventionnels (laine de verre, laine de roche) et que leurs conditions de mise en œuvre sont les mêmes ?
Malheureusement, leur avantage est rarement un coût inférieur. Il n’y a guère que dans le cas d’une isolation de plancher de combles en vrac en ouate de cellulose ou laine de coton recyclé, que le coût d’un isolant biosourcé peut être plus avantageux que celui d’un isolant conventionnel. Cependant, le développement croissant de ces matériaux finira probablement par rendre ceux-ci plus attractifs.
Leur avantage principal est leur faible énergie grise. Autrement dit, les isolants biosourcés, à l’inverse des matériaux de synthèse issus de l’industrie pétrolière ou des isolants d’origine minérale, réclament peu d’énergie lors de leur fabrication. En effet, leur processus de fabrication ne comprend pas de phases de chauffage à des températures aussi élevées que la laine de verre, de roche, ou bien encore des isolants expansés. Recourir à des isolants biosourcés est donc une démarche cohérente consistant à utiliser peu d’énergie pour permettre d’en consommer moins dans nos logements.
Un autre avantage sur le plan technique de quelques-uns des isolants biosourcés, est le déphasage thermique. Il s’agit du temps mis par le flux de chaleur pour traverser une paroi. Comme vu précédemment, un isolant s’oppose au flux de chaleur traversant une paroi en l’atténuant, mais aussi en retardant le flux de chaleur résiduel. Ce décalage dans le temps est notamment intéressant dans le cadre du confort d’été. Dans ce cas, on souhaite retarder l’arrivée du flux de chaleur à l’intérieur du logement, de manière à ce que celle-ci coïncide avec une période de la journée où il est possible de surventiler le logement (fin de soirée, nuit) pour évacuer les calories entrantes.
Le déphasage thermique est donc une affaire de dosage. Il est inutile d’avoir trop de déphasage thermique si cela conduit à décaler l’arrivée du pic du chaleur le lendemain lorsqu’il faut déjà refermer les fenêtres pour se couper de la chaleur extérieure. Sur ce point précis, les isolants biosourcés font donc valoir leur densité. En effet, le déphasage thermique est directement lié à la masse du matériau qui stocke provisoirement les calories. Ils sont en effet mieux placés que les isolants légers tels que le polystyrène, le polyuréthane, la laine de verre.
Bien que sensibles à l’eau à partir d’une certaine quantité et durée d’exposition, c’est pourtant pour leur propriété capillaire que les isolants biosourcés sont recherchés dans un cas bien précis. Dans le cas du bâti ancien avec des murs en pierres, les isolants biosourcés présentent l’avantage de ne pas perturber le fonctionnement d’origine du mur, et notamment la régulation de l’humidité de celui-ci. Construit à une époque sans dispositif spécifique pour éviter les remontées capillaires, un mur en pierres contient davantage d’eau qui s’évapore en atteignant les parements intérieurs ou extérieurs. En mettant en œuvre un isolant capillaire, cette eau n’est donc pas piégée à l’intérieur du mur et peut toujours atteindre les parements et s’évaporer.
En bref (résumé) :
Un isolant biosourcé est un isolant d’origine végétal choisi pour ses bonnes performances et demandant une mise en œuvre soignée pour être efficace. Son prix assez peu compétitif en règle générale est compensé notamment par ses propriétés intéressantes en matière de déphasage thermique et de capillarité pour la rénovation du bâti ancien. Son avantage principal tient à la faible énergie pour le produire qui en fait un isolant écologique de premier plan.
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